UN GRAND MERCI JEANNE CASSARD, JOURNALISTE AU PARISIEN POUR CE BEL ARTICLE !

Article publié sur le site internet Le Parisien 10 mai 2021

Depuis trois ans, les élèves de CM1 ou CM2 de la ville développent leur esprit critique grâce à des ateliers à visée philosophique. Le dispositif, lancé par l’association SEVE, séduit tant qu’il va être déployé auprès de 750 000 enfants.

Trappes, ce lundi. L’association Seve a organisé 900 ateliers depuis quatre ans dans la ville afin de faire découvrir la philosophie à 1800 enfants. LP/Jeanne Cassard

Par Jeanne Cassard Le 10 mai 2021 à 20h35

Assis en cercle, chacun attend son tour avant de prendre la parole. « Être gâté », « Partager », « Bonheur »… Au tableau, les idées sur le thème du jour : la richesse. Les petits philosophes débattent et s’écoutent les uns les autres, même lorsqu’ils ne sont pas d’accord. À Trappes (Yvelines), vingt-deux élèves de CM2 de l’école Jean-Baptiste-Clément ont ainsi participé ce lundi à leur onzième atelier à visée philosophique de l’année.

Expérimentées depuis 2018 auprès de tous les enfants de CM1 ou CM2 de la commune, « ces sessions d’une heure leur permettent de développer leur esprit critique », explique Nadia Hai, la ministre déléguée à la Ville. À travers des thèmes comme le bonheur, la famille ou l’égalité filles-garçons, chacun donne son opinion. « L’objectif est de leur apprendre à échanger et respecter le point de vue de l’autre. »

La ministre s’était justement rendue ce lundi à Trappes pour signer une convention afin de déployer le dispositif dans 200 cités éducatives sur tout le territoire, auprès de 750 000 écoliers. Originaire de la commune, Nadia Hai a lancé ces sessions avec le philosophe Frédéric Lenoir, président de la fondation Seve (Savoir être et Vivre ensemble), lorsqu’elle était députée de la circonscription.

«Ils ne sont pas là pour être notés, c’est un moment où ils s’expriment librement»

« Les enfants démarrent par quelques minutes de silence où ils font des exercices de respiration et, ensuite, chacun prend la parole. Ils ne sont pas là pour être notés, c’est un moment où ils s’expriment librement », indique-t-il. En quatre ans, l’association Seve a fait découvrir la philosophie à 100 000 enfants et formé 4 000 éducateurs sur tout le territoire. À Trappes, ce sont 900 ateliers qui ont été pratiqués avec 1 800 petits.

Le débat est encadré soit par un animateur de l’association, soit par l’enseignant. « Mon rôle est de les guider dans leur pensée, je ne dois pas induire les réponses sinon ça deviendrait vite un cours de philo », explique Hiyon, qui anime les échanges.

Même si on est seulement en CM2, on a compris qu’on pouvait réfléchir par nous-mêmes. Maintenant, on peut jouer tous ensemble sans se disputer. On va plus souvent vers les autres.

Dans cet établissement, ce sont 178 élèves du CP au CM2 qui participent aux ateliers. En cherchant comment faire en sorte qu’ils ne cèdent pas aux fake news, rumeurs, théorie du complot ou fanatisme… « L’idée est de mieux les armer contre les obscurantismes », poursuit Nadia Hai.

Tester le dispositif à Trappes était pour elle, « tout naturel ». « Ici, il y a beaucoup de choses à faire et il faut commencer par les questions d’éducation. » Depuis la mise en place de ces ateliers en septembre, Pauline Poret constate de nombreux changements chez ses élèves, tant en classe que dans la cour de récréation. « Le climat s’est apaisé, je ne suis plus obligée d’intervenir à chaque fois, ils règlent leurs conflits entre eux posément », raconte l’enseignante. Loin d’être impressionnés par la visite de la ministre, les enfants racontent avec enthousiasme leur expérience. « Même si on est seulement en CM2, on a compris qu’on pouvait réfléchir par nous-mêmes », estime Linda.

Alors qu’avant, filles et garçons jouaient chacun de leurs côtés, désormais il y a plus d’échanges entre les élèves.

« Maintenant, on peut jouer tous ensemble sans se disputer, on va plus les uns vers les autres. » Surtout, selon l’ensemble du groupe, « tout le monde peut philosopher, même des enfants ». Un constat partagé par les parents. « J’ai vu l’attitude de Marwan changer, il est plus mature et pose beaucoup de questions sur l’actualité, raconte Atika, la maman du petit garçon. L’autre jour, il m’a parlé de Socrate. »

J’ai vu l’attitude de Marwan changer, il est plus mature et pose beaucoup de questions sur l’actualité. L’autre jour, il m’a parlé de Socrate.

Atika, maman de Marwan, 10 ans